Le mariage forcé

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Le présent rapport concerne la problématique des mariages forcés en Guinée. Il s’agit d’une mise à jour du COI Focus intitulé Le mariage daté du 13 avril 2015.

La recherche des informations contenues dans ce rapport, réalisé avec l'aide du Fonds européen pour l'asile, la migration et l'intégration (FAMI), s’est clôturée le 11 décembre 2020.

En Guinée, le mariage est à l’origine de la constitution de la famille, il est valorisé comme un moyen d’accéder à un meilleur statut social et il consacre l’alliance de deux familles. Le mariage précoce des filles est quant à lui principalement motivé par la volonté d’éviter les grossesses précoces, lesquelles jettent le déshonneur sur la famille. A côté du mariage coutumier, le mariage religieux est considéré comme le plus important. Selon des nouvelles dispositions introduites dans le Code civil, l’époux peut, lors de la célébration du mariage civil, opter pour un mariage sous le régime de la monogamie ou de la polygamie. Une source affirme que la majorité des mariages sont célébrés sans délivrance d’acte officiel par un officier de l’état civil.

Les femmes en Guinée font l’objet de diverses formes de violence, de discrimination et d’injustice en raison de la persistance de préjugés socioculturels. Le mariage arrangé est perçu comme la norme et est le type de mariage le plus répandu en Guinée. Quand la jeune fille n’est pas associée aux négociations préalables et que s’exerce sur elle une violence psychologique et/ou physique pour qu’elle accepte de se marier avec celui que la famille a choisi, il y a lieu de considérer qu’il s’agit d’un mariage forcé.

Les mariages précoces représentent une pratique répandue sur l’ensemble du territoire, et plus particulièrement en zone rurale. Selon l’Enquête démographique et de santé (EDS) V de 2018, 17 % des femmes de 20 à 24 ans ont été en union avant 15 ans et 46,4 % avant 18 ans. Dans la tranche d’âge des 15-19 ans, l’enquête révèle que 10,5 % des filles sont mariées avant d’atteindre l’âge de 15 ans. Les sources sont divisées sur la question du mariage forcé de femmes majeures. Certaines affirment qu’il s’agit de faits rares. D’autres considèrent que des femmes adultes peuvent être mariées de force mais qu’elles ont davantage de possibilités de s’y opposer. Bien qu’il ne soit préconisé par aucune religion, la pratique du mariage forcé est plus importante parmi la population musulmane. Le mariage forcé existe au sein de toutes les communautés ethniques mais est le plus prégnant parmi les Peuls. D’autres facteurs interviennent dans la prévalence du mariage précoce comme le niveau de pauvreté, le niveau de scolarisation et le risque de grossesse hors mariage. Une source nuance ces considérations en affirmant que c’est le degré d’ouverture des parents qui intervient plus que l’éducation.

S’agissant des possibilités de s’opposer à un mariage forcé, les sources s’accordent pour dire que la pression sociale est importante sur les filles pour qu’elles accèdent au choix parental. Toutefois, certaines sources affirment qu’une jeune fille suffisamment instruite de ses droits et jouissant d’un caractère fort aurait une réelle chance de parvenir à échapper par la négociation à un mariage forcé, à condition d’avoir le soutien de certains membres de la famille, ou d’un chef religieux, ou d’une organisation non gouvernementale (ONG), ou d’une autorité locale par exemple. La possibilité de refuser dépend de l’environnement dans lequel la fille a grandi. En cas de refus, certaines sources considèrent que la jeune fille, qui inflige une humiliation à ses parents, risque d’être reniée par sa famille et/ou rejetée par la société. D’autres sources estiment qu’une fille majeure a la possibilité de faire entendre son opposition.

Le nouveau Code civil de 2019 fixe l’âge légal du mariage à dix-huit ans, tant pour les filles que pour les garçons, et érige le consentement mutuel des époux en un principe fondamental. Le Code pénal exprime l’interdiction formelle du mariage forcé. Des sanctions sont prévues pour toute personne contrevenant ce principe. Les juridictions compétentes en premier ressort pour les affaires pénales et civiles sont les tribunaux de première instance, ainsi que les justices de paix dans les préfectures qui ne comportent pas de tribunal de première instance. En décembre 2009 a été créé l’Office de protection du genre, de l’enfance et des mœurs (OPROGEM), un service de police spécifiquement compétent sur les problématiques de genre. L’OPROGEM intervient à la suite de dénonciations. De l’avis général des interlocuteurs rencontrés par le Cedoca, les moyens à disposition de l’OPROGEM sont toutefois limités. En outre, les poursuites dans des cas de mariages forcés sont rares en Guinée malgré l’existence de lois et seuls quelques cas de condamnations en la matière sont connus. Les femmes victimes s’adressent généralement peu à la justice. Les principales raisons en sont le manque de connaissance de leurs droits, l’analphabétisme, le fonctionnement irrégulier des cours et tribunaux, les coûts générés par une action en justice ainsi que la crainte de stigmatisation sociale et le rejet familial. Le plus souvent, les conflits qui concernent des mariages forcés se concluent par des médiations ou des règlements à l’amiable.

La lutte pour l’abandon de la pratique des mariages précoces est inscrite dans les missions du ministère de l’Action sociale, de la Promotion féminine et de l’Enfance (MASPFE) qui ne dispose néanmoins pas d’un plan stratégique national. Le MASPFE travaille de concert avec les multiples ONG nationales et internationales présentes sur le terrain. Ces dernières mènent principalement des campagnes de sensibilisation et d’information, des consultations juridiques et des actions de médiation familiale. Dans le contexte décrit, si les personnes militant pour l’abandon du mariage forcé peuvent subir la pression sociale de la part de personnes favorables au maintien de la pratique, les difficultés qu’elles rencontrent n’émanent pas des autorités guinéennes, elles-mêmes engagées dans la lutte contre le mariage précoce. A cette lutte sont également associés les autorités religieuses ainsi que les médias.

Politique de traitement

La politique définie par le commissaire général se fonde sur une analyse approfondie d’informations récentes et détaillées sur la situation générale dans le pays. Ces informations ont été recueillies de manière professionnelle auprès de diverses sources objectives, dont le Bureau européen d’appui en matière d’asile, le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies, des organisations internationales de défense des droits de l’homme, des organisations non gouvernementales, ainsi que la littérature spécialisée et les médias. Pour définir sa politique, le commissaire général ne se fonde donc pas exclusivement sur les COI Focus publiés sur le site du CGRA, qui ne traitent que de certains aspects particuliers de la situation du pays. Le fait qu’un COI Focus date d’un certain temps déjà ne signifie donc pas que la politique menée par le commissaire général ne soit plus d’actualité.

Pour examiner une demande d’asile, le commissaire général tient non seulement compte de la situation objective dans le pays d’origine à la date de la décision mais également de la situation individuelle et des circonstances personnelles du demandeur. Chaque demande d’asile est examinée au cas par cas. Le demandeur d’asile doit montrer de manière suffisamment concrète qu’il éprouve une crainte fondée de persécution ou court un risque réel d’atteintes graves. Il ne peut donc se contenter de renvoyer à la situation générale dans son pays mais doit également présenter des faits concrets et crédibles le concernant personnellement.

Pour ce pays, il n’y a pas une note de politique de traitement disponible sur le site Internet du CGRA.

Land: 
Guinée